Premier Chapitre
Elle courait à perdre haleine.La peur au ventre.
La peur d’être rattrapée.
La peur de recevoir encore des coups.
Pieds nus, elle ne comptait plus les écorchures, mais elle n’en avait cure.
Sa planche de salut… c’était la fuite… à condition qu’il ne la rattrape pas !
Il ne faut pas que je tombe sinon c’est terminé pour moi. Tiens bon ! Ne cessait-elle de se répéter.
À la sortie du bois, un grillage lui barra la route. Elle n’y avait pas pensé. Les aires de repos sont grillagées pour empêcher les gens de sortir. Les automobilistes sont prisonniers de l’autoroute. Leur seule issue c’est le péage !
Elle entendit hurler son prénom dans le bois.
Il était à sa poursuite.
S’il la rejoignait, il la frapperait, lui ferait payer d’avoir tenté de fuir !
Elle accéléra. Surtout ne pas faiblir.
Elle prit sur la droite en longeant le grillage.
Les senteurs d’herbe humide et d’écorce emplissaient l’atmosphère laissant présager une perspective de liberté.
Des larmes traçaient des sillons sur ses joues. Pas des larmes de tristesse, des larmes de liberté, des larmes d’espoir qui grandissait après chaque mètre parcouru.
Un peu plus loin, elle aperçut le portail coulissant du personnel de la station-service.
Sa seule issue pour sortir de ce piège !
Une voiture patientait devant, prête à sortir.
Elle courut encore plus vite, les poumons en feu.
Enfin, elle atteignit la voiture et se jeta d’épuisement sur le capot. La conductrice baissa sa vitre et protesta :
— Hé ! Ҫa ne va pas !
La jeune fille se redressa et s’approcha de la portière.
— Pitié ! Emmenez-moi avec vous, il va me tuer ! cria-t-elle, haletante.
La conductrice ouvrit de grands yeux. Elle se demandait si ce n’était pas une folle comme on en en-tend parfois parler aux informations. En plus, à la façon dont elle était vêtue, c’était certainement une étrangère.
— Qu’est-ce qui vous arrive ? demanda-t-elle enfin.
La jeune fille lui montra ses bras et son visage couverts d’hématomes.
— Je vous dis qu’il va me tuer ! Laissez-moi monter s’il vous plaît ! Sur ces paroles, elle n’attendit pas la réponse et s’installa sur le siège passager. La portière claqua, écartant la menace pour un temps.
— Dépêchez-vous ! Il va arriver d’une minute à l’autre ! Tenez, le voilà, là-bas ! hurla-t-elle en mon-trant du doigt un homme qui courait vers elles.
— Démarrez, je vous en supplie !
Une fois le portail grand ouvert, la Fiesta fit un bond en avant devant les yeux enragés du poursui-vant. Furibard, les poings serrés devant le portail qui se refermait, il regardait s’éloigner la petite voi-ture dont il avant mémorisé le numéro d’immatriculation.
En retournant à sa voiture, il ruminait des menaces, pensait déjà aux supplices qu’il lui infligerait dès qu’il la retrouverait. Ceux ou celles qui lui résistaient, ceux qui se rebellaient contre sa volonté de-vaient en payer le prix fort. « Elle paiera cette salope », grogna-t-il en sortant du bois. Appuyée contre une camionnette, une jeune femme l’attendait une cigarette à la main.
— Je te jure que je n’ai rien pu faire, dit-elle en écrasant son mégot avec sa chaussure.
— Je t’avais dit de ne pas la laisser sortir de la voiture ! Putain ! lui cria-t-il au visage, accompagnant ses paroles d’une tape sur la tête.
— Elle a pleurniché, elle avait envie de faire pipi. Elle a menacé de faire dans la voiture.
— Attends-moi là. Je vais à la station tenter d’avoir des renseignements sur la gonzesse qui l’a em-barquée.
— Laisse tomber ! On s’en fout de cette fille. On est ensemble et on a plein de fric.
— Certainement pas ! Je veux la retrouver cette salope ! Elle doit payer !
Elle haussa les épaules d’agacement et alluma une autre cigarette en le regardant courir vers la station.
Il s’approcha de la serveuse.
— Bonjour, je pourrais avoir un café, s’il vous plaît ?
— Je vous le prépare tout de suite. Ce sera tout ?
— Non. Je voudrais parler à votre collègue qui était là avant vous.
— Louise ? Elle a terminé son travail. Pourquoi voulez-vous la voir ?
— Je suis intéressé par sa voiture, une Ford Fiesta, c’est bien ça ?
— Ah ! Je comprends. Je ne savais pas qu’elle vendait sa voiture. Elle reprend demain.
— À quelle heure ?
— Comme aujourd’hui, à neuf heures. Voilà votre café, Monsieur. Deux euros, s’il vous plaît.
En lui tendant la pièce, il lui demanda.
— C’est dommage, j’aurais voulu la voir aujourd’hui. Vous connaissez son adresse ?
— Non, désolée. Excusez-moi, mais il y a des clients qui attendent.
Il la remercia et rejoignit sa voiture où l’attendait sa compagne, impatiente.
— Alors, tu as obtenu ce que tu voulais ?
— Ouais. On va chercher de quoi se loger pour cette nuit et demain on règle le problème. Je te jure qu’elle va me le payer.
— Tu es dingue. On perd du temps avec cette nana qui te déteste. À la première occasion elle te…
— C’est bon ! Allez, on y va ! Dès que j’aurai mis la main sur cette saleté, elle aura affaire à moi