Premier Chapitre
Margaret, le plumeau dans la main droite, époussetait le meuble antique du salon, tout en surveillant du coin de l’oeil l’arrivée de Fernand, le facteur du village.Comme tous les lundis matins, son jour de repos, elle entreprit le grand ménage du salon. La musique de la neuvième symphonie de Beethoven emplissait le silence et le soleil brillait en cette belle matinée du mois de mai.
Elle aperçut Fernand qui lui faisait de grands signes de la main.
Madame Hatcher, du courrier pour vous.
Merci Fernand, belle journée, n’est ce pas?
Oui, ça fait du bien, allez, à la prochaine!
Tout en tenant le paquet de lettres, Margaret s’approcha du guéridon et commençait à y déposer les lettres en les vérifiant une à une, lorsque soudain son regard fut attiré par une enveloppe blanche plus épaisse qui dépassait des autres. Sans savoir pourquoi elle l’attirait irrésistiblement et son nom qui y était inscrit, d’une écriture fine et serrée, lui était à la fois inconnue et familière.
Une appréhension envahit Margaret et elle se mit à trembler sans savoir pourquoi. Ses jambes flageolèrent et l’obligèrent à s’asseoir sur le canapé damassé jaune de style Louis XVI. La peur l’étreignit, elle se sentit oppressée et n’arrivait pas à ouvrir l’enveloppe.
Qu’est ce que c’est? Pourquoi est ce que je réagis comme ça? On dirait que la personne a voulu déguiser son écriture. Le timbre vient de Rome en Italie. Pourquoi ai je l’impression de me sentir menacée?
Elle commença à ouvrir l’enveloppe et une feuille s’en échappa ainsi que deux photos. Elle les ramassa et les regarda intensément. Sur la première, elle vit un beau petit bonhomme blondinet d’environ trois ou quatre ans, avec de grands yeux bleus. Il portait un chandail rayé bleu et blanc et un petit short bleu marine, ainsi qu’une paire d’adidas et des bas de couleur marine. Il jouait avec un petit chien et un large sourire éclairait son visage. Elle retourna la photo sur laquelle était inscrit: Elijah, 28 avril 1978. Un vertige la saisit, ce n’était pas possible! Ses yeux se remplirent de larmes et elle eut beaucoup de mal à regarder la seconde photo tellement les larmes lui obstruaient la vue. Elle aperçut sur l’autre photo une adorable fillette blonde d’environ trois ou quatre ans qui souriait de toutes ses dents. De grands yeux bleus éclairaient son visage et deux petites fossettes creusaient ses joues. Elle portait une petite robe rose et un ruban retenait ses longs cheveux blonds bouclés. Aux pieds, une jolie paire de sandales et des bas blancs. Elle tenait dans ses bras un beau chat persan noir et blanc et son regard joyeux était dirigé droit sur la personne qui la photographiait. Au dos de la photo: Dakota, 28 avril 1978.
Margaret suffoqua, c’était plus qu’elle ne pouvait en supporter. Quelle douleur! 28 avril 1978, le pire jour de sa vie, celui qu’elle n’oublierait jamais, celui auquel elle n’avait cessé de penser chaque jour depuis quatre longues années. Ce terrible jour où elle avait perdu ce qu’elle avait de plus cher, où elle avait perdu la raison et auquel elle avait cru qu’elle ne survivrait pas.
Les photos gisaient sur le tapis. Margaret secouée de sanglots ne comprenait pas se qui se passait. Pourquoi lui envoyer cela? Pourquoi raviver sa douleur? Qui pouvait être aussi cruel? Et pourquoi maintenant?
Lentement elle déplia la lettre et lut: ” On t’a menti depuis trop longtemps, mais tu dois savoir que ton enfant n’est pas mort à sa naissance comme on te l’a fait croire, au contraire, TES enfants sont vivants! Tu dois connaître enfin la vérité .“
Margaret passa du désespoir à l’espoir insensé. Est ce que ça pourrait être vrai? Et comment, et pourquoi lui aurait t on fait cela? Pourquoi son père lui aurait il menti? Et si c’était vrai? Mais des jumeaux! Personne ne lui avait parlé de ça, quoique ...